Interview M Le Maudit
Puisant dans son environnement et ses propres expériences de vie, M Le Maudit dévoile un projet sincère et libérateur, où le réel surgit pour imprégner et modeler sa musique. Rencontre avec l’artiste parisien à l’occasion de la récente sortie de Poème Poison.
Cul7ure : Ça fait maintenant quelques semaines que ton projet Poème Poison est sorti. Comment te sens-tu par rapport à la réception du public ?
M le Maudit : Je me sens bien, comme pour tous mes projets. En vrai, je n’ai pas d’attentes particulières, quand j’ai fini un projet, je le sors et je vois ce qu’il se passe. Je ne me dis pas que ça va faire un triple disque de platine ou un score merdique. C’est comme un bébé que tu fais naître. Tu es content qu’il soit né, tu ne vas pas directement penser au fait qu’il va intégrer Harvard ou non.
7C : Est-ce que tu sens que tu as passé un cap, par rapport à tes autres projets ?
M : À chaque projet, je franchis un nouveau cap, que ce soit en termes de réalisation, d’univers, de proposition musicale. Je franchis des nouveaux steps petit à petit, en attendant les plus gros.
7C : Même en termes de construction, est-ce que tu réalises que tu as franchi un palier à ce niveau-là ?
M : Carrément ! À la base, j’avais une manière particulière de travailler sur la direction musicale, uniquement avec un producteur, Yung Cœur. Sur mes deux premiers projets, il a composé 100% des productions, du coup, c’est une manière de travailler qui est très intéressante, qui est plus intime et liée sur l’humain. Sur Poème Poison, c’était vraiment “artistique”, on a bossé avec 5-6 beatmakers, pour un projet de 9 titres. On a vraiment eu l’idée d’avoir plusieurs pattes, comme une palette. Et dans l’idée, musicalement, j’ai franchi un cap, car j’ai réussi à travailler avec des gens très talentueux, que je n’aurai pas pu avoir avant. Même au niveau des productions, par exemple Hola, c’est un morceau que je n’aurai pas pu faire avant, car ma musique n’était pas un stade assez avancé, pour que je puisse me dire que je pouvais faire un morceau aussi éloigné de ma direction artistique.
7C : Tu viens d’évoquer ta manière de travailler avec Yung Cœur, peux-tu nous la décrire ?
M : Dans le déroulé, c’est à peu près comme avec tous les beatmakers. Quand on travaille sur une prod, je lui dis mes envies et il sait ce qu’il doit faire. Ce qui diffère des autres beatmakers, c’est au niveau de la compréhension. Il va directement me faire une proposition qui va me plaire car on a fait x morceaux ensemble, donc c’est plus rapide de faire du son avec lui.
7C : Mais sur Poème Poison, tu as travaillé avec d’autres producteurs. Sortir de ta zone de confort, c’est quelque chose que tu aimes ?
M : Bien sûr, j’aime beaucoup ça. Au final, si tu écoutes </3, mon premier projet, c’est que de la trap avec des 808 et musicalement, c’est comme si c’était cinq fois le même morceau, c’est très homogène. Mais sur I Hate Love, on avait déjà commencé à s’exporter sur d’autres choses. Par exemple, j’ai dit à Yung Cœur que j’aimerai faire un morceau qui s’appelerait Horloge et il a directement compris, il m’a dit qu’il allait utiliser le “tic” d’une horloge comme élément principal de la prod. C’est d’ailleurs un de mes morceaux préférés.
7C : Un des thèmes principaux du projet est le crack et les ravages que cette drogue fait sur ton quartier. Comment ton environnement t’influence-t-il en tant qu’artiste ?
M : Un artiste c’est une éponge. Ce que tu crées, tu ne l’as pas inventé, c’est quelque chose que tu as absorbé. Moi, dans mon schéma de création, j’absorbe, je vois, je vis des trucs. Avec mes sens, j’assimile un bail et je le retranscris derrière en musique. Il y a pleins de choses que tu vas entendre dans mes sons, c’est juste des scènes que j’ai vécues. Je prends juste des bouts de réalité et je les mets dans ma musique, tout simplement.
7C : Il y a quelque chose de très visuel dans ta musique.
M : C’est sensitif, dans ma musique je vois beaucoup. Quand tu vas écouter 3ème Étage, il y a beaucoup de petites scènes avec un personnage qui fait ci, qui fait ça. En gros, il y a des éléments qui arrivent dans le réel, il y a ton cerveau et la connexion qui arrive entre les deux ce sont tes sens. Boum, tu fais la connexion, t’assimiles l’élément réel en toi, et moi ce que je fais à partir de ce moment-là, c’est que j’écris ce que je ressens, ce que j’ai vu et ce que j’ai entendu.
7C : On ressent que ce projet est très ancré dans le réel, par rapport aux précédents. Dans I Hate Love, tu disais souvent “j’fais des rêves où tout le monde meurt”, il y aurait-il un parallèle avec les crackheads de ton quartier, qui sont assimilés à des morts-vivants dans l’intro ?
M : J’avais pas pensé à ça comme ça, mais ça peut être un parallèle qu’on peut faire. En tout cas oui, c’est beaucoup plus ancré dans le réel. Dans I Hate Love, je disais plus ce que je ressentais personnellement, mais les sentiments sont des choses très abstraites. Quand je disais “j’fais des rêves où tout le monde meurt”, c’est ancré dans une réalité mentale, mais il y a pas un personnage réel que tu peux conceptualiser. Dans Poème Poison, c’est la réalité. C’est aussi lié à mon mode de création, où sur I Hate Love, j’étais sur moi-même et là je suis en mode extérieur. On verra dans le prochain si je suis en mode intérieur-extérieur ou si je suis en mode parallèle ! (rires)
7C : Sur la cover, tu es représenté sous la forme d’une peinture réalisée par Stéphanie Macaigne. Qu’est ce qui t’as plu dans son travail et comment avez-vous travaillé ensemble ?
M : Tu te rappelles ce que je t’ai dit tout à l’heure sur le beatmaker ? C’est pareil. Je lui ai expliqué ce dont j’avais envie et je lui ai fait écouter le projet, c’est très important pour qu’elle puisse se mettre dans l’univers. Je lui ai aussi expliqué ce que j’aimais en termes de peinture, et derrière, cette meuf est très forte et très talentueuse, elle a sa patte et moi mes idées, et donc ça fait une cover. C’est exactement de la même manière que l’on fait un morceau. Moi j’ai des idées que je ne peux pas réaliser, car si demain je devais faire une cover en peinture, ça me prendrait trois ans et ça serait pas aussi bien. Comme je le dis tout le temps : “Si t’as des bonnes idées, essaie de t’entourer de gens compétents, parce que tu pourras pas tout faire”. Au moment où j’arrive à mes limites, je fais appel à quelqu’un qui peut m’amener beaucoup plus loin. C’est le cas pour Stéphanie, mais c’est aussi le cas pour tous les beatmakers. Tous les gens qui collaborent et qui font soit de la photo, du clip, du visuel, du beatmaking, etc. Eux, ce sont des “mains” archis importantes, sans eux je ne peux rien faire.
7C : Tu t’efforces toujours à créer une alchimie avec les personnes avec qui tu travailles, on sent que c’est important pour toi et que tu veux arriver à quelque chose de fini et qui rassemble pleins de talents différents.
M : Il y a deux points, l’alchimie et le talent. L’alchimie, j’aime ça parce que c’est stylé, c’est jouissif de créer quelque chose avec des gens qui te comprennent. Quelqu’un avec qui tu as une alchimie artistique, c’est bon, parce que tu peux avancer, tu peux aller tout droit. Au pire, vous allez faire une erreur ensemble, mais vous allez recommencer et ça c’est des bonnes conditions de travail. Au-delà de ça, si tu as des bonnes conditions de travail avec quelqu’un qui bosse bien et qui a du talent, t’as gagné. Tu peux t’entendre bien avec des gens qui sont pas très forts, mais c’est frustrant.
Il y a aussi une deuxième chose. Par exemple, quand on écoute un projet, il va y avoir le nom de l’artiste et basta, c’est tout. Du coup, tu as tendance à te dire: “Ouais, j’écoute un artiste, il a pensé tout de A jusqu’à Z, c’est un putain de génie !”. Mais c’est faux, ça n’arrive jamais. Même les plus grands génies ont besoin d’un ou deux coups de main. En vrai, c’est stylé aussi de se dire, quand t’écoutes un projet : “ Ah ouai, y’a cinq, six, sept, huit mille personnes talentueuses qui se sont mises sur un seul et même projet !”. Moi je suis grave saucé de pouvoir me dire que j’ai réussi à convaincre un photographe, une peintre, des mecs qui ont rien à voir avec moi et qui font de la FX, etc.
7C : D’ailleurs c’est quelque chose qui se ressent, notamment dans ton parcours, puisque tu as toujours été entouré, que ce soit avec la 75e session ou avec LTF. Tu es toujours dans une démarche de travail d’équipe et on sent que c’est important pour toi.
M : C’est même pas important pour moi, c’est capital. Concrètement, tu vas faire quoi si t’es tout seul ? Tu peux pas t’auto filmer, donc t’es obligé, mathématiquement, d’avoir quelqu’un qui te filme. Si tu veux faire des prods tout seul, il faut que tu prennes trois ans pour être bon, à part si tu es un génie absolu, mais c’est 1% de la population. Tu ne peux pas faire les choses tout seul, c’est impossible, en tout cas pour moi, il faut toujours des gens qui m’entourent. En vrai, ma force, c’est que j’arrive à convaincre les gens de bosser avec moi sur des projets. J’arrive toujours à réussir à alpaguer encore plus de gens et grossir la boule de gens qui sont autour de moi, et pour faire avancer mon travail.
7C : Pour revenir sur la cover, il y a une sorte de couleur verte qui est peinte sous tes yeux. Serait-ce une référence au poème Le Poison, de Baudelaire ? Dans ce dernier, le poète écrit : “Tout cela ne vaut pas le poison qui découle de tes yeux verts”.
M : Tu trouves des références archi stylées, j’ai le seum. Tu veux pas bosser avec moi ? (rires) Franchement, j’aurais bien aimé te dire oui, mais non. Pour moi, ça fait très bleu, comme si j’avais un bleu après m’être mangé une pêche ! Après, la peinture, ça reste libre à toute subjectivité. Si toi tu vois Baudelaire, c’est peut-être plus stylé qu’un œil au beurre noir. C’est ça que j’aimais aussi chez elle (Stéphanie Macaigne), c’est qu’elle est pas dans l’hyper-réalisme, donc du coup c’est pas un truc fixé, c’est plus abstrait. Chaque coup de pinceau n’est pas non plus défini, t’es pas en mode : “Ok, je vois exactement ce que c’est”. C’est ça que j’aime bien dans la peinture, chacun se mange un peu le truc. Elle a grave ce côté “gros coup de pinceau” -j’ai peur de dire une bêtise- soit impressionniste, soit expressionniste. Le fait que ce soit des gros coups de pinceau et que tu sois obligé d’aller super loin pour voir, du Van Gogh en gros. En tout cas, je suis grave content de ce tableau.
7C : On sent que la poésie est quelque chose de prépondérant dans ton travail. En 2019, sur Belphegor et Ombre, tu disais : “J’suis plus un poète que mon prof de français”. Quel est le rapport que tu as avec cet art ?
M : Je vais pas mentir, je lis pas de la poésie et des poèmes tous les jours, c’est pas vrai. Moi j’ai fait des études littéraires, donc j’ai été au contact de la poésie, je l’ai analysée, je l’ai étudiée, mais entre plusieurs autres genres littéraires. Mais en fait, c’est plus la poésie du rap que j’aime développer. Tu peux te prendre un Baudelaire et le rapper, mais c’est guezmer. Pourtant c’est de la poésie, c’est profond, mais on est pas là à vouloir faire du Baudelaire en rap. Mais par contre ce qui est intéressant, c’est de développer une poésie du rap. Et aujourd’hui, il y a des artistes qui sont lus et étudiés en université, par exemple MC Solaar. C’est de la poésie musicale. Moi, j’ai toujours kiffé bien dire les choses dans le rap. Tous les gens que j’ai écoutés dans ma vie, c’était des Oxmo Puccino, des gens qui disaient bien les choses. Ma base, c’est des mecs qui disent des trucs stylés. Après aujourd’hui, j’ai appris à aimer des rappeurs qui sont crus, qui disent rien de spécial, qui ont leurs images à eux. Mais moi, personnellement, j’aime bien dire les choses.
7C : Tu parlais d’Oxmo et ce qui est bien chez lui, c’est qu’il a l’art de bien dire les choses, mais surtout de bien les raconter. Il y a quand même une nuance entre les deux.
M : En fait, il y a deux Oxmo. Je me suis assassiné à Oxmo, donc je connais vraiment bien tout. Il y a le Oxmo storytelling, sur Alias Jon Smoke, le son avec Booba, Guerilla… Il a un talent pour te raconter une histoire, t’es dedans, t’es avec lui etc. Mais au-delà de ça, si t’écoutes Opéra Puccino, en 98, c’est incroyable. Sur Visions de vie par exemple, c’est que des images, sur images, sur images… Il dit “J’vois l’avenir comme un type myope, qui la nuit porte des Raybans, surpassés d’un masque de Zorro”. Il voit l’avenir comme ça ? C’est incroyable ma gueule !
J’écoutais ça quand j’étais petit, ça m’a trop matrixé dans ma tête à me dire : “Il faut pas dire “j’ai pas d’avenir”, il faut dire “j’vois l’avenir comme…”. Il faut être Oxmo en fait !
7C : Tu disais chez Grünt que cette école fin des années 90, début 2000 t’avais beaucoup influencé, et que tu n’écoutais que ça jusqu’en 2010 à peu près. Tu t’es vraiment construit sur ça.
M : À l’époque, il y avait la Tecktonik. Après, il y avait des trucs comme Sefyu, c’était stylé, mais c’était l’époque de la crise. De mes 11 ans, quand j’ai commencé à écouter du son, jusqu’à mes 16 ans, j’écoutais que du son à l’ancienne. Je retrouvais pas ce truc de dire des belles choses, d’être deep et tout. J’aimais pas les prods à l’époque, d’ailleurs je les aime toujours pas. C’était l’époque du dirty et je trouvais que ça puait sa mère. Ça a dû jouer dans le fait que j’écoutais pas ce qui sortait.
7C À partir de quand as-tu commencé à élargir tes goûts ?
M : Quand j’avais 17-18 ans je pense, j’ai commencé à écouter d’autres trucs. Ça c’est les meufs, elles m’ont fait écouter d’autres trucs, donc je me suis mis à écouter des bails d’électro et tout, et ça m’a ouvert un peu plus. À l’époque, il n’y avait pas encore la trap comme on connaît, mais quand elle est arrivée, à l’époque de Versace, je me la suis pris. Après, j’ai commencé à être à la pointe plutôt que d’être tout derrière, je me suis dit : “La trap c’est incroyable de ouf, j’ai vraiment envie de tout connaître”.
7C : Au fil de tes œuvres, il y a beaucoup d’éléments qui se répondent et se font écho entre eux. Cependant, toujours chez Grünt, tu disais que tu n’étais pas un artiste qui calculait ce qu’il faisait. Comment arrives-tu à mêler ta spontanéité et le fait que tu vis dans le présent, avec ton envie de bâtir un univers cohérent ?
M : Poème Poison se base sur la réalité, je n’ai pas besoin de construire d’autres univers que la réalité que j’ai devant moi, qui en soi, est déjà un univers parallèle dans notre réalité. Je vois et les dingueries qui se passent dans cette réalité sont déjà suffisantes pour créer un univers bien fort. Déjà pour I Hate Love, c’était plus de l’introspection, en mode tu assois en tailleur dans ta tête et t’essaies de voir ce que tu ressens, ce que t’as dans le cœur. Ça a pris plus de temps pour faire I Hate Love, parce que ça prend du temps pour savoir ce que tu ressens, pour penser à des trucs beaucoup plus profonds. J’ai parlé de mon daron qui est mort et quand j’étais petit, c’était un drame. J’avais besoin de mettre en place certaines choses de mon côté et de me dire : “Vas-y je m’en bats les couilles, j’en parle parce que ça va me faire du bien”.
C’était plus compliqué de mêler la spontanéité et un univers sur I Hate Love, mais c’était beaucoup plus simple sur Poème Poison, parce que c’est la réalité. Je le vis, je l’écris. J’avais beaucoup utilisé le soleil noir dans I Hate Love, c’était une recherche esthétique, mais là, dans Poème Poison, t’as pas besoin, les choses reviennent par elles-mêmes.
7C : L’année dernière a été ponctuée par la crise sanitaire, et malheureusement, par plusieurs drames que tu as traversés. Comment ces événements ont-ils conditionné et influencé ta musique ?
M : Ça n’a pas forcément conditionné ma musique, dans le sens où je suis une éponge, s’il m’arrive un truc bien, je vais en parler. Il y a des trucs positifs dans le projet, mais si on t’enlève un frère, t’as mal, on t’enlève deux frères, t’as encore plus mal. Tu peux pas faire semblant, en tout cas moi je peux pas faire semblant, dans mon optique de ce projet, je voulais dire la réalité. Il y a beaucoup de phrases qui reviennent par rapport à ça, en hommage, parce que c’est la réalité que je retranscris. J’espère ne plus jamais parler de trucs comme ça, mais c’est sûr que ça va teinter ma musique, à jamais.
7C : Même si la tonalité du projet est très morne et désabusée, on ressent qu’il y a quand même une énergie dévastatrice qui sommeille en toi, notamment sur le morceau 10k avec Caballero. Dans quel état d’esprit es-tu quand tu poses avec lui, qui est reconnu comme étant un gros kicker ?
M : J’ai une relation particulière avec Caba, parce que j’étais un fanatique de lui, je connaissais tout. Un jour, il apparaît au studio où j’enregistre, le dojo, il était en train de faire un son avec Sheldon, et comme par hasard, ils avaient pas d’ingé son, c’était le truc rêvé. J’arrive, j’enregistre et je vois qu’il est grave tranquille, donc on commence à parler. Il m’a grave bien accueilli, et depuis on a gardé une bonne relation. Et déjà à l’époque, il y a deux-trois ans, il me dit : “ Viens on fait de la musique”. À ce moment-là, je me suis dit : “Flemme de me faire écraser la tête”. Mais maintenant, j’ai pris beaucoup plus confiance en moi, du coup j’étais content de l’avoir, comme un dresseur Pokémon, je l’ai dans le Pokédex, je l’ai attrapé. Et en vrai, c’est un honneur qu’un rappeur comme ça se donne à ce point. Tu lui dis : “Viens on va faire un clip” et il répond : “Ouai, pas de problèmes, je te mets la journée, même deux jours”. Ça donne une reconnaissance à ton travail, ça fait plaisir.
7C : Dans ta musique et dans ton écriture, il y a un côté très ambivalent et contradictoire, qui se voit même dans les titres de tes projets. Le contraste est-il quelque chose qui fait partie de toi ?
M : Je crois que je le fais même pas exprès. Premièrement, j’ai la flemme de développer un projet sur un seul et même concept. Pour le coup, I Hate Love c’était stylé parce que ça me permettait de dire beaucoup de choses : pourquoi j’aime pas l’amour, mes relations avec les gens etc. Mais si j’avais fait un projet uniquement sur l’amour, ça aurait été gazant ou un projet que sur la haine, pareil. Le truc qui est stylé, c’est que quand t’opposes deux trucs, tu peux aller plus loin, t’es pas cantonné à un seul et même aspect du bail. Et en vrai, je le fais naturellement, parce que de toute manière, il y a du positif et du négatif, que tu le veuilles ou non. Quoiqu’il en soit, il va y avoir des moments dans ta vie où tu vas être grave bien, d’autres où tu vas être grave mal. Et dans mon optique de décrire la réalité, je suis obligé de dire que le monde est en même temps beau et crade. Quand je te parle d’un truc très sombre, derrière je vais avoir tendance à te dire un truc plus léger pour équilibrer. J’ai fait des morceaux où c’était que de la haine et c’est intéressant au niveau des émotions, mais c’est pas des morceaux que tu pourras écouter tout le temps.
7C : Après trois projets courts, Poème Poison vient-il clore une trilogie ? Peut-on espérer un projet plus long pour le futur ?
M : Je crois pas. Le prochain projet sera court et je le pense comme une suite de Poème Poison. Le problème c’est que pour faire un album, il faut avoir 17 titres, mettre beaucoup d’argent, que ce soit bien produit, il faut tellement de choses. Alors que pour un projet court, ce qui est bien c’est que tu peux être qualitatif avec moins de moyens. Je préfère que tu te manges 16 morceaux par an plutôt que 58000 morceaux. Je sais que je vais créer une base fan plus logique, en ayant des gens qui savent que ce sont des morceaux lourds qui sortiront, plutôt que de sortir des sons à l’usine, j’ai pas le talent de Jul. Dans mon mode, le format court c’est le meilleur équilibre entre sortir des trucs et sortir des bons trucs, le max de la qualité. Si j’étais un mec qui sortait 15 morceaux tous les quatres mois, ça aurait pu être logique que je fasse des gros projets. Je suis un mec productif, mais réaliste.
7C : Que peut-on te souhaiter pour la suite de ta carrière ?
M : Des streams, de la santé, du bitcoin, la famille, l’argent, l’amour. Si j’arrive à avoir 50 % de ça, c’est déjà pas mal !
Merci à Inès pour les superbes photos, à Florian pour m’avoir épaulé et au café Le Formidable pour l’accueil !