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Ninho – Destin

Ninho – Destin

Même si l’actu rap semble s’être (légitimement) arrêtée pour se focaliser sur des lives youtube de planètes et de shit volant, il y a tout de même de belles sorties d’albums. D’ailleurs, hier est sorti un projet dont la cover a beaucoup fait parler : Destin.

DESTIN, chronique d’un nouveau riche

Comme vous venez de le déduire , on va parler Ninho. C’est d’ailleurs assez inutile de rappeler qui il est en 2019. Il est devenu une personnalité incontournable du rap français. Véritable machine à bangers, il enchaîne les succès tout en donnant l’impression que c’est facile à faire. Après avoir évité les leaks, j’ai forcément écouté le projet à minuit. J’espérai aussi un projet surprise de Nekfeu, de PNL ou de 13 Block mais pour ça, faudra s’armer de patience.

L’album Destin est donc sorti et à mon humble avis, c’est une véritable réussite. La formule Ninho prend toujours et il fera évidemment un beau chiffre de ventes. Du coup, je vais plutôt m’attarder sur le fond que sur la forme.

©Fifou

Avant de lancer l’écoute du projet, j’me suis demandé ce qu’il avait encore à dire car même si je l’ai pas dit dans l’intro : Ninho est partout. C’est un des artistes qu’on a le plus vu sur des featurings. Rien que l’année dernière, on l’a vu avec Rim’k, Sofiane, YL, Leto, Naza, Sch, Hornet la Frappe et environ 30 millions d’autres rappeurs. Outre le fait qu’il est « bankable » et que c’est un super kickeur, Ninho est un rappeur intègre et une sorte d’agréable sincérité se dégage de lui.

Malgré tout, je m’attendais à une sorte d’album assez festif, voire de Player et… bah c’est totalement l’inverse. Disons que c’est un peu comme si en allant au ciné voir un blockbuster, je tombai sur un blockbuster avec De Niro. C’est beau et c’est tout bénéf.

Sans peine et La vie qu’on mène, les deux premiers morceaux annoncent la couleur du reste du projet. D’une part, on a une énergie débordante et contagieuse. De l’autre, on a une sorte de mélancolie étrange mêlée à la fameuse honnêteté dont je parlais au-dessus. (Cf la dernière phase du couplet de La vie qu’on mène)

Vis comme un pauvre, ne montre pas ta richesse

On fera les beaux, quand y’aura plus rien à faire

Ninho – La vie qu’on mène

L’argent est très important dans Destin. En soi, c’est ce qui a littéralement changé sa vie et pourtant, c’est toujours avec méfiance qu’il l’aborde mais jamais de manière totalement joyeuse. Et justement. C’est pas un album joyeux. C’est ce qui m’a d’ailleurs frappé avec le projet.

Ici, Ninho est un nouveau riche qui s’ennuie et qui ne sait plus trop ce qu’il doit en penser. A certains moments, il a l’air totalement désabusé; un des risques de la célébrité quand on est un jeune rappeur. Ça m’a fait forcément fait penser au morceau Reflexions Basses de Vald quand lui aussi évoquait le regard de son entourage qui changeait soudainement.

Même moi, j’me regarde et je viens pas m’aider, est-ce que c’est moi que tu suces ou c’est V.A.L.D?

Vald – Réflexions Basses

Toute sa vie, il a voulu être riche, aujourd’hui, il l’est et il comprend peu à peu que c’est pas une fin en soi. (Bojack Horseman fait d’ailleurs le même constat dans la saison 5).

Certes, c’est très agréable pendant un temps mais Ninho comprend aussi que ça lui apporte en même temps pas mal de galères et de nouveaux problèmes.

Le thème des riches qui s’ennuient, c’est peut-être pas le thème le plus innovant dans le rap mais là, c’est toujours réalisé avec la musicalité adéquate. De plus, c’est toujours mieux que les riches qui jouent aux faux pauvres mais c’est un autre sujet.

D’ailleurs, en featuring, y’a aussi un autre rappeur qui a beaucoup évoqué ce thème : c’est Jul. C’est sûrement ce qui fait que le featuring est aussi réussi et cela montre aussi que Jul devrait d’ailleurs prendre des prods d’autres Beatmakers. En tout cas, leur collaboration est réussie puisqu’ils maîtrisent tous les deux le sujet.

Pour conclure, l’album est un croisement entre la solitude d’un nouveau riche, la peur constante de la trahison amoureuse mais aussi celle d’être aimé juste pour son argent. L’album est super bien produit, Ninho est au sommet de son art, rapologiquement parlant. Ses flows sont toujours carrés et la sincérité ne manque pas. Tous ces thèmes forment pour moi la colonne vertébrale et la partie la plus personnelle et intéressante. (Toujours disséminés entre plusieurs phases; sûrement par « pudeur »). C’est un peu comme quand Freeze Corleone entre deux phases complotistes place un “Et ça m’fait mal quand j’pense à des gens d’qui j’dois parler au passé”. En bref, les prods sont de très haute qualité et la musicalité va vous surprendre.

Ps : Évitez de faire un T avec vos bras dans la rue et de manière plus générale : Évitez les jeans blancs.