Mac Miller, le gosse de Pittsburgh
Initialement, cet article était prêt une semaine avant l’annonce tragique de sa mort. C’est donc notamment par « décence » et pour éviter un potentiel opportunisme qu’on ne l’a pas sorti dans les jours qui ont suivi sa disparition. J’avais choisi de chroniquer l’album Swimming car il était d’une douceur incroyable (et parce qu’il m’avait accompagné pendant tout l’été). Etant donné que l’article était un peu long, j’ai décidé de le diviser en deux et la seconde partie sortira donc demain. J’ai aussi pris la décision d’allonger la partie qui précède l’album car j’ai vu trop de fois qu’on appelait Mac Miller « l’ex d’Ariana Grande ». En soi, c’est pas faux mais c’est très réducteur quand on sait tout ce qu’il a traversé et exploré musicalement. REP Malcolm James McCormick.
People love me, they don’t even know my last name
Tout d’abord, au début des années 2010, il avait sorti une mixtape remarquable intitulée K.I.D.S. (Kickin’ Incredibly Dope Shit). C’était pas sa première mais à l’époque mais c’était la première fois qu’autant de morceaux entraient dans les tops des charts ; ce qui lui a permis de se faire un nom. Parmi eux, Don’t Mind if I Do (qui sample le doux Fireflies d’ailleurs) mais aussi Senior Skip Day ou encore l’entêtant Knock Knock. C’est une des plus belles mixtapes qu’il y ait pu sortir. Une des raisons de son émergence est liée au fait que la plupart des morceaux étaient accompagnés de clips. Sur ces derniers, on pouvait d’ailleurs le voir, débordant d’énergie et très heureux. Il suffit de les revoir pour sentir à quel point il s’amusait et voir qu’il prenait autant plaisir à les rapper qu’à les clipper.
Je vous parle d’un temps.. où on ne pouvait pas les rater sur Youtube. On le sait parfois un peu moins mais cette époque a aussi influencé nos rappeurs français. Par exemple, au début de Schweppes Agrum’ & Chicken Chicka de Dinos, on pouvait entendre au début un sample de l’incontournable Kool Aid & Frozen Pizza, un choix assez logique puisque le morceau était dans le même esprit adolescent. Même le S-crew avant de devenir fade avaient notamment rappé sur la Face B de Nikes On My Feet. Le morceau a un peu vieilli et on peut les voir déclarer leur flamme à la marque à la virgule. Un peu plus tard, Disiz a aussi eu l’honneur de poser un couplet sur Loud puis de l’inviter sur Extra-Lucide et Lomepal rappera sur Thoughts From a Balcony).
Cette époque a été autant marquante aux Us qu’en France car il est devenu une sorte de source d’inspiration. Mac Miller était originaire de Pittsburgh (mais pas du même coin que le regretté Jimmy Wopo) et il a sorti K.I.D.S., à une époque où le « gangsta rap » était encore bien présent. Il apportait un contre-pied intéressant, il avait l’image d’un mec sympa et c’était compliqué de le détester. Du coup, la plupart des rappeurs qui se répétaient qu’ils n’avaient pas besoin de street cred’ pour se lancer ne pouvaient forcément que l’apprécier et les autres rappeurs le trouvaient passionné, cool et tranquille.
Take over the world when I’m on my Donald Trump shit
Par la suite, les choses se sont un peu tassées, il a continué son petit bonhomme de chemin malgré un petit beef avec… l’actuel président des US pour le titre Donald Trump. Ce dernier n’avait pas apprécié qu’on le cite dans un morceau alors que de base Mac Miller l’avait namedrop en disant qu’il voulait être riche comme lui mais ça lui avait pas plu. (Avant son éléction et son virage politique, on en retrouvait des dizaines de phases de ce genre).
Malgré tout, Blue Side Park avait bien fonctionné cependant on entendait de moins en moins parler de lui jusqu’à environ 2016. Pourtant, la qualité de ses morceaux n’avait pas spécialement baissé et le projet Best Day Ever reste dans le top 5 de ses meilleurs projets. Assez récemment on a entendu retentir le morceau Dang! Un titre très estival, festif et joyeux, accompagné d’Anderson .Paak. La mélodie est très entraînante et la collaboration est un véritable cocktail de fraîcheur. Inconsciemment, je pense que ce morceau a dessiné ce à quoi allait ressembler l’album Swimming. Car même si le morceau Dang ! est très fun, on sent tout de même une petite pointe de mélancolie dans le refrain, qui a toujours été une toile de fond chez Mac Miller.
I got angels, no more Satan, Looks like God is on my side
À cette époque, il va -vraiment- se rapprocher d’Ariana Grande et sans rentrer dans du Gossip, sa musique va évoluer. On sort de la dépression post-WMWTSO et on voit qu’il a l’air plus apaisé et stable. Lorsque The Divine Feminine sort, on sent qu’il est heureux à nouveau, un peu comme il avait pu l’être au début de sa carrière. Il est amoureux et il le met en musique.
De plus, on voit qu’il a pris en compte les critiques qui ont pu être faites sur ses projets précédents qui pouvaient paraître « trop sombres » vu qu’il évoquait pas mal ses troubles (même si paradoxalement c’est aussi ce qui faisait la beauté des projets). Sur The Divine Feminine, Mac Miller a trouvé la musicalité adéquate pour pouvoir créer un projet beau et cohérent. L’album parle donc beaucoup d’amour et le morceau Cindarella, en feat avec Ty Dolla $ign, est même explicitement dédiée à sa compagne.
Quand on écoute le projet, on sent que Mac Miller est au sommet de ses émotions, semble avoir surpassé sa dépression qui le rongeait depuis des années. On le sent (enfin) épanoui, serein et détendu. Pourtant, malgré tout ça, la vérité semble être plus complexe. En effet, comme elle a pu l’expliquer à plusieurs reprises, Mac Miller souffrait aussi de gros problèmes d’addictions et même ayant vraiment mis du sien afin de l’aider à s’en sortir, leur relation s’est donc achevée.
Life couldn’t get better, This gonna be the best day ever
Dans les médias, on n’a pas vu spécialement de retombées mais la « réponse » de Mac Miller a surtout été musicale. C’est donc une ambiance post-rupture que le chef d’oeuvre Swimming a été créé. (Quelle transition incroyable vers l’article de demain).
Pour conclure, Mac Miller est un rappeur remarquable et à l’image d’une génération de rappeurs dynamiques et ultra créatifs. Il a toujours bien été accompagné et a collaboré avec des rappeurs allant de Lil B à Odd future en passant par Chief Keef, Snoop ou Cam’ron. Ses projets, toujours à l’image de sa génération sont des marques-pages sur ses émotions. Chaque projet est symbolique et même si la fin de sa carrière est assez tragique car il avait un potentiel énorme, continuez d’écouter sa musique car au final, c’est le plus grand héritage qu’il ait pu laisser. (Mais écoutez pas la fin de Fight The Feeling sur une enceinte).
Feel much better when that weather isn’t rain
Mac Miller – Cindarella (feat Ty Dolla $ign)