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Le rap français, mais où sont les femmes ?

Le rap français, mais où sont les femmes ?

Diam’s. Ce nom résonne dans les esprits comme le symbole du rap féminin français. Identifiée comme la porte-parole des femmes dans le milieu, l’artiste semble avoir laissé un vide en lâchant le micro. Si aux Etats-Unis certaines parviennent à s’imposer dans le milieu, la France semble difficilement tolérer les femmes. Pourtant, si l’on se penche de plus près sur le rap game, elles y évoluent, peut-être moins comme MC que comme collaboratrices des rappeurs. Retour sur la place des femmes dans le rap. 

Le rap : un nom dont le féminin n’existe pas.

Le développement du genre musical en France s’est fait dans l’ombre des femmes. Si des artistes comme Keny Arkana se sont ancrées dans la scène française, elles ne font pas l’unanimité et surtout, restent dans l’ombre des rappeurs. Les meilleures ventes restent leurs propriétés , les Zenith se remplissent pour eux. Lala &ce 667 ou encore Kayanna Isis ont certes marqué le rap français de ces dernières années mais leur prospérité et leur impact commercial restent limités. Plus récemment, Chilla a fait son apparition, adoptant un discours volontairement féministe et prônant l’ouverture du rap à ses paires. Malgré sa notoriété, elle continue à être cataloguée comme une simple ‘chanteuse’. C’est la plupart du temps la veste qu’elle enfile dans ces featuring, comme lorsqu’elle chante le refrain d’un des titres de l’album de l’iconique Kery James. Etre crédible quand on est ‘une femme qui fait du rap’, demande d’autant plus d’acharnement. Bien au delà de leur représentativité, elles sont aussi discréditées par les rappeurs eux-même. On ne peut effectivement pas dire que le féminisme ait le vent en poupe dans le domaine. Des lyrics tranchants à l’égard du deuxième sexe, une communication autour de l’image du mâle alpha et un credo qui semble guidé les plus grands albums du rap français : « toutes des putes sauf ma mère, ma femme et ma fille ». Difficile donc pour des femmes d’évoluer dans un milieu où le sexisme est la norme.

Si la porte est fermée, elles passeront par la fenêtre…

La voie semble néanmoins s’entrouvrir et laisser aux femmes la possibilité d’émerger. Des émissions comme Le Cercle essaient de promouvoir au maximum la parité, des collaborations de plus en plus mixtes se mettent en place et des nouveaux artistes voient le jour, essayant de reconsidérer la place de la femme dans leur texte. Au-delà de l’impulsion au sein des professionnels, il existe aussi les réseaux sociaux. Ils se présentent comme des moteurs centraux à la démocratisation des femmes dans la scène française. Iamaliyas est par exemple une artiste qui a évoluée grâce à Instagram. Si elle chante autant qu’elle rap, elle a réussi à se créer une réelle légitimité de rappeuse et comptabilise aujourd’hui plus de 83 000 abonnés. Cette jeune artiste est l’exemple d’un mouvement plus large : les femmes se font leur propre place. Plus décomplexées, ancrées dans une société qui s’émancipe et propulsées par un ensemble d’initiatives, les femmes essaient bel et bien de s’emparer du rap game, non sans difficultés.

Des femmes de l’ombre qui portent le rap. 

Mais si les femmes étaient bien présentes ? En France, elles sont nombreuses à travailler dans le milieu, là où on ne les attend pas. Manager, attaché de presse, journaliste, photographe, réalisateur : tous ces postes se déclinent au féminin. Si aux Etats-Unis ces professionnels sont presque aussi connus que les artistes eux-même et sont souvent des hommes, en France, c’est plus humblement que les femmes occupent ces postes. De Elisa Parron à Roxane Peyronnenc, ces photographes nouvelle génération sont celles qui capturent les tournées des plus grand. Plus influente encore, Anne Cibron, manageuse de Booba et ayant collaborée avec les plus grands, elle peut aujourd’hui se vanter d’être une des femmes de l’ombre les plus importantes du rap game français. Bien que minoritaires, elles sont de plus en plus nombreuses à occuper ces postes. Si on les voit pas, les femmes ont bien un impact sur le rap français, et bien plus qu’il n’y parait. 

Un constat mitigé donc sur la place qu’occupe les femmes dans le milieu du rap français. Minoritaires, elles le sont, mais elles sont aussi bien plus importantes qu’il n’y parait. Ne pas minimiser leur absence encore trop grande mais ne pas non plus sous estimer leur rôle en coulisse, c’est là tout l’enjeu lorsque l’on parle de rap au féminin. Comme derrière un miroir sans tain, elles voient et font le rap sans êtres vues. Car si on veut les rendre invisible, sans elles, aucun homme n’aurait pu s’asseoir sur le Trône